Sa chaise est posée sur le bitume et ses fleurs colorées vous regardent la mine incertaine. Il n’a pas le sourire facile, mais la cohue de fin de journée ne saurait en faire un caprice. Quelques seaux d’eau et des paquets parfumés sont arrivés là, vous ne parvenez pas à vous imaginer comment. Depuis des années déjà, cet homme se livre à son petit commerce, métro Lionel-Groulx, fleuriste à ciel ouvert.
Quand il est de bonne humeur, vous réussissez à choisir vos fleurs, autrement, il compose votre bouquet comme il l’entend. A-t-il un horaire? Sera-t-il au rendez-vous? Simplement, il est là pour servir ceux qui ne se posent pas de questions, qui ont à dire et qui diront, s’alliant à la force des gestes impromptus.
Quand il plie boutique, il balaie le sol, laissant quelques pétales à la sortie de la bouche de métro. Un jeune couple l’a observé suffisamment pour en extraire la poésie : « Nous sommes peut-être les deux seules personnes à Montréal qui utilisent ce point de repère, “on se rejoint aux Pétales!”1 »
Ils ont connu le personnage alors que leur amour naissait. Plus ils se fréquentaient, plus leurs allées et venues autour de cette station intermédiaire à leurs appartements se multipliaient. Ils avaient d’abord remarqué ces étranges épaves contrastant parmi les mégots et la poussière, jusqu’au jour où ils virent l’homme rouler son diable et décharger sa beauté, au cœur du tumulte.
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NOTES
1 Propos d’un participant anonyme.
